
En septembre 2020 et en pleine pandémie de Corona, la première borne de recharge publique bidirectionnelle a été installée en Belgique. En avril 2021, le premier site de bornes de recharge bidirectionnelle est installé par ABB chez SWECO. Ce projet pilote a été réalisé grâce à des subventions du Gouvernement flamand. Récemment, un particulier a également investi dans une borne de recharge bidirectionnelle Wallbox. En soi, rien de bien nouveau donc. La question qui se pose désormais est la suivante : assistons-nous à une telle montée en puissance des bornes de recharge bidirectionnelle que nous en possèderons bientôt une permettant d’utiliser la batterie de notre voiture comme une sorte de pack de recharge pour notre habitation ? Ou, à contrario, cette tendance est-elle un phénomène limité ? Stroohm a enquêté sur la situation actuelle et ses potentiels obstacles.
Qu'est-ce qu'un chargeur bidirectionnel ?
La technologie de charge bidirectionnelle vous permet à la fois de charger et de décharger votre voiture. De cette façon, vous pouvez alimenter votre maison ou le réseau électrique avec la batterie de votre voiture. Ce type de borne de recharge vous permet, par exemple, de stocker l'énergie solaire dans la batterie de la voiture pendant la journée et de l'utiliser plus tard, ou encore de la vendre plus cher lors d’un moment de pointe. Attention : votre voiture doit être adaptée à ce système ! Actuellement, seules la Nissan Leaf, la Mitsubishi Outlander PHEV et l'ancienne Kia Soul sont compatibles avec ce système car elles utilisent un connecteur plus ancien appelé « CHADEMO ». Les prises modernes CCS, dont sont équipés tous les véhicules actuels, n’ont pas encore été adaptées aux bornes de recharge bidirectionnelle. En d’autres termes, ces dernières sont inutilisables pour 99% des véhicules électriques. Il se murmure néanmoins que certaines voitures sont déjà techniquement équipées mais que le système restera verrouillé par logiciel tant que l’on ne disposera pas d’un cadre clair pour l’activer.

Qu'exige l'opérateur du réseau ?
La fédération des gestionnaires de réseaux Synergrid gère une liste de tous les onduleurs – ou convertisseurs – homologués autorisés à injecter de l’électricité dans le réseau. Il existe ainsi par exemple de nombreux convertisseurs pour panneaux solaires et, à présent, des bornes de recharge bidirectionnelle. Vous pouvez retrouver cette liste dans le document C10/26 où la Wallbox Quasar a été récemment homologuée. Sachez également que vous êtes dans l’obligation de signaler les points de charge à votre gestionnaire de réseau. Pour d’évidentes raisons de sécurité, les points de charge bidirectionnelle doivent cesser d'injecter dans le réseau lorsqu'ils fonctionnent. Vérifiez donc attentivement quelles bornes de recharge peuvent être installées.
Prix de revient
Les chargeurs bidirectionnels ne sont ni encore vendus ni installés en grand nombre. Et avec un coût de 5775€, cette nouvelle technologie reste plus chère qu'une borne de recharge classique (750€ à 1200€). De plus, impossible d’en retirer un surcoût puisque vous ne pouvez pas encore optimiser l’électricité pour 5000€ via votre batterie. À partir du moment où les taux horaires seront introduits, ce tournant sera atteint plus rapidement. Actuellement, un prix de revient de 3000€ maximum s'inscrit dans un investissement financièrement intéressant. Admettons également que les coupures de courant deviennent fréquentes, alors, outre le prix de revient, un aspect confort non négligeable sera lié à cet investissement : votre voiture sera en mesure d'alimenter votre maison en électricité pendant une semaine. C’est la raison pour laquelle le Japon a fait charger et décharger tant de Nissan Leaf après la fermeture de son parc nucléaire.

Employeur et fisc
Quiconque pense recharger à moindre coût au bureau afin de réduire la facture énergétique à la maison aura bien du mal à passer inaperçu car la consommation augmentera de façon exponentielle. Une bonne politique automobile fait de bons accords. Il ne sera donc généralement pas autorisé de recharger au bureau à des fins privées. Supposons néanmoins que cela soit autorisé par l'employeur, les autorités fiscales auront probablement un avis différent sur la question. Il s’agirait après tout d’un avantage en nature, donc imposable, et, de par ce fait, l’avantage se verrait de facto annulé. En conséquence, selon Stroohm, bon nombre d’entreprises inhiberont plutôt que favoriseront la charge bidirectionnelle car l'administration et le suivi qui en découleraient seraient par trop élevés.
Société de leasing et garantie
La plupart des véhicules électriques sont des véhicules d’entreprises. Étant donné que la charge bidirectionnelle a un impact sur le vieillissement de la batterie, les chances sont minces que les sociétés de leasing – propriétaires de la voiture – acceptent ce système. La valeur résiduelle reste un élément important dans leur tarification. Les contrats sont actuellement établis en fonction des kilomètres parcourus et non en fonction du nombre de cycles que la batterie a effectués. Les marques automobiles ne sont pas mieux loties : leur garantie est également déterminée en fonction des kilomètres parcourus. Stroohm s’attend donc à de nombreux ajustements et de limitations en termes d’utilisation et de garantie, ce qui limitera inévitablement la mise en œuvre.
Conclusion
Il y a donc encore des choses à ajuster dans le parc automobile afin de fournir des bornes de recharge bidirectionnelle aux flottes de véhicules professionnels. Mais force est de constater que cette technologie finira par prendre le dessus grâce aux nombreux bénéfices qu’elle apporte à la transition énergétique.